n° 106 - 2020-21
Le social sous la pression du Covid /2
Plus d’un an, désormais, que la crise sanitaire s’est installée dans nos vies. Ses répercussions économiques, sociales, familiales, mais aussi psychologiques, se font de plus en plus sentir. Quels sont les constats des professionnels ? Comment, malgré l’usure qui les touche eux aussi, parviennent-ils à tenir ? La réponse est au coeur de ce qui fait leur métier : le souci de l’autre et la conviction qu’il faut accorder plus d’importance aux personnes dans leur singularité et leur globalité.
Éditorial
Cela fait à présent plus d’un an que la crise sanitaire s’est installée dans nos vies. Plus d’un an que nous vivons les yeux rivés sur les indicateurs quotidiens de la pandémie, nous demandant de quoi demain sera fait…
Les effets économiques et sociaux de la crise se sont amplifiés. Certains secteurs professionnels (horeca, culturel) basculent dans la pauvreté. Les emplois se raréfient, les opérateurs de la réinsertion sont suspendus aux quelques occasions de relancer la dynamique chez les chercheurs d’emploi. Et tout ce marasme, assombri par la menace d’un nouveau confinement plus strict, détériore sérieusement la santé mentale. Tout un chacun est impacté et plus encore ceux et celles fragilisés au départ : personnes ayant des troubles psychiques, en situation de pauvreté, isolées, âgées, victimes de violences conjugales, etc., auxquelles s’ajoutent de nouvelles catégories telles que les indépendants, les jeunes, les enfants. Les professionnels du social et du soin affichent eux-mêmes des signes d’usure morale, psychologique.
Sans y être préparés, ils se sont lancés dans de nouvelles organisations du travail, poignant dans l’urgence, la priorisation contrainte, les solutions alternatives, la temporisation, le tout distanciel, le présentiel en gardant ses distances, le mixte distanciel/présentiel... Ils ont fait front à des difficultés multiples : stress, surcharge de travail, obligation de s’adapter en permanence au gré des nouvelles mesures sanitaires, dilemmes éthiques, frustration, culpabilité...
Et pourtant, transparaissent aussi de leurs contributions à ce dossier des motivations fortes, des élans d’enthousiasme, des idées neuves, un certain art du bricolage au cas par cas, des convictions plus aiguisées. La crise met en évidence ce qui fait la richesse de ces métiers du soin et de l’aide et qui ont à cœur la personne, la relation, la confiance, l’empathie, la socialité, le respect de chacun, de ses rythmes, différences, histoires singulières ; dimensions qu’elle a malmenées, presque niées, diraient certains, au profit des aspects biomédicaux.
La pandémie continue à brimer notre humanité et il nous faut toujours vivre avec, mais des premières analyses, des débuts de prise de recul, des appels à reconsidérer ce qui doit faire priorité se font entendre. Les acteurs du Social renouent avec la dimension politique que contiennent leurs convictions et que réclame leur éthique ou conscience professionnelle. Ils revendiquent ainsi une plus grande attention aux individus dans leur particularité et leur globalité, un plus grand accès aux droits pour les publics plus fragiles et plus durement touchés par la crise, une remise en question des mesures sanitaires et des sanctions associées discriminantes et inégalitaires, et enfin davantage de moyens pour leurs secteurs, trop souvent d’ordinaire déjà mis à la diète.
Colette LECLERCQ & Romain LECOMTE
Sommaire
– Un hôpital psychiatrique au temps du Covid-19 - Frédérique VAN LEUVEN
– Covid-19 et relation éducative. Des interactions « bousculées » - Jonathan COLLIN
– L’aide spécifique « Covid-19 » au CPAS de Liège - Laura QUINTART
– Migrations. Le Covid-19, révélateur des inégalités internationales - Cécile VANDERSTAPPEN
– Le volontariat en temps de crise - Emmeline ORBAN
– Crise sanitaire, solidarité et justice sociale - Philippe VAN PARIJS
ILLUSTRATION DE LA COUVERTURE :
– Noémie LABROSSE Plus d’infos sur l’artiste
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- n°120 | Faire place à l’usager
- n°119 | L’intégration, l’affaire de tous
- n°118 | L’indispensable collectif
- n°117 | Où va le métier d’éducateur ?
- n°116 | Devenir parent. Quand tout n’est pas rose
- n°115 | Jeunes "incasables" - Comment mieux travailler ensemble ?
- n°114 | Nouveaux visages de la précarité & inégalités grandissantes
- n°113 | Quel accès à l’emploi pour les publics plus fragiles ?
- n°112 | Quand il y a urgence
- n°111 | L’usager au centre des réseaux
EN LIEN AVEC CE NUMÉRO
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Grossesse et violences conjugales : impact sur l'enfant
Retour au sommaire du n°59 "Enfants exposés aux violences conjugales" Auteur(s) : Dr Muriel Salmona, Psychiatre-psychothérapeute, Responsable de l’Antenne 92 de l’Institut de Victimologie, Médecin du Réseau Victimo, France Premières lignes : De nombreuses études montrent que si la (…)