n° 35 - 2002
Consommation, surendettement : informer, éduquer, prévenir
Ce dossier fait le point sur nos modes de consommation. Insatiables, irresponsables, ils fragilisent notre planète et renforcent les inégalités sociales. Comment informer, protéger, prévenir le surendettement ? Comment éduquer, responsabiliser, apprendre à chacun à se réapproprier ses choix en matière de consommation ?
Éditorial
Nous vivons dans une société de surconsommation et c’est d’abord cette pression constante à acheter, à consommer plus qu’il ne faut, le nécessaire comme le superflu, que nous avons voulu, sinon dénoncer, rappeler pour ouvrir ce dossier. Certes, nous sommes preneurs, à croire que cela fait partie de notre nature, de notre culture... à moins que cela ne soit en grande partie attribuable aux images léchantes et léchées d’une publicité intelligente, omniprésente et qui tend à nous faire croire que le bonheur passe par l’acquisition l’accumulation, l’adoption d’une marque, du dernier modèle, de la dernière mode... Ah ! il semble qu’il soit bien difficile de résister. Pourtant, si l’on n’y prend garde, nos modes de consommation risquent de nous coûter cher.
De plus en plus énergivores, générant une quantité de plus en plus énorme de déchets, ils sont la cause de problèmes environnementaux graves que l’on ne peut plus ignorer.
De même, s’ils participent à une amélioration générale du confort et du bien-être, ils renforcent aussi les inégalités sociales, les rendant plus ostentatoires, plus aiguës. Les normes sociales de consommation ne cessent en effet d’être relevées, chacun rêve d’un mieux, d’un plus mais les écarts de revenus s’accroissent également, plaçant à la limite de la précarité, un nombre de plus en plus important de personnes pour lesquelles cette émulation peut se transformer en exclusion.
Pour améliorer l’ordinaire, assumer des dépenses imprévues, les ménages à revenus modestes n’ont en effet souvent d’autre choix que de recourir au crédit. Mais il arrive que ces engagements se multiplient : 500 euros pour les frais d’hôpital du cadet, 1250 pour le mariage de l’aîné, 2450 pour la voiture, ... et qu’ils dépassent la capacité de remboursement des emprunteurs. C’est alors l’escalade : factures en retard, mises en demeure, huissiers de justice, menaces de saisie et aux difficultés financières, s’ajoutent encore des tensions, des ruptures au sein de la famille, un mal être grandissant, un isolement presque total...
La lutte contre le surendettement doit se décliner à différents niveaux. Pour commencer, elle nécessite une réglementation stricte en matière de crédit avec une attention particulière pour les publics les plus vulnérables et une responsabilisation accrue des prêteurs.
Elle demande ensuite une information accessible et une divulgation suffisante pour que chacun puisse défendre ses droits de consommateur et exercer son pouvoir d’achat en toute connaissance de cause.
Mais l’information comme telle ne suffit pas toujours pour amener une réelle prise de conscience. Il faut parfois l’analyser, la décortiquer, la faire vivre au travers de jeux de rôles et de situations réelles, pour qu’elle devienne pleinement signifiante. C’est cela faire de l’éducation à la consommation.
Les programmes scolaires devraient comporter des pédagogies actives visant à faire comprendre aux enfants et aux ados le rôle de la publicité, son impact, les effets de mode, le fonctionnement des crédits... Devenus adultes, ils seraient ainsi moins vulnérables et mieux armés pour repousser les avances de notre société de surconsommation.
Les écoles de consommateurs, récemment mises en place par Th. Detienne, Ministre régional des Affaires sociales, s’adressent quant à elles, à un public précarisé. Elles existent, sont une centaine et fonctionnent sur la proximité, la force du groupe, le partage de vécu, les échanges d’expériences...
Mais il ne faudrait pas croire pour autant que l’éducation à la consommation soit réservée aux jeunes et au public précarisé. Nous sommes tous des (sur)consommateurs, parfois irresponsables ou impulsifs, et nous avons certainement tous à apprendre à nous réapproprier véritablement nos choix de consommation, que ce soit pour respecter notre budget, ne pas s’endetter inutilement et dangereusement, ne pas vivre au-delà de nos moyens, ne pas gaspiller, respecter notre environnement et notre santé, marquer notre solidarité vis-à-vis des pays moins bien lotis, résister à la publicité, renoncer à l’emprise de marques, développer d’autres manières d’être...
Colette Leclercq
Sommaire
– De la dictature du marché à la découverte du consommateur - Pierre SALENGROS
– La société des mangeurs - François BRUNE
– Le consommateur manipulé - Marc VENDERCAMMEN
– Publicité & développement durable : un couple impossible ? - Antoinette BROUYAUX
– Des modes de consommation qui fragilisent la planète et ses habitants - Natacha ZUINEN
– Du surendetté au consommateur : chercher de nouveaux chemins - Nadine FRASELLE
– A propos du règlement collectif de dettes
– Le surendettement profond et ses conséquences constituent une forme atténuée de mort civile - Philippe BROGNIET
– CPAS de Mons : informer, sensibiliser, changer le regard... Question de dignité - P. CASTERMANT
– La liberté, c’est aussi le pouvoir de dire NON - Thierry BARTHOLOME
– La prévention du surendettement dans le cadre du crédit à la consommation - Didier NÖEL
– Une centrale des crédits aux particuliers positive - A. LAMBRECHTS
– Le crédit social : un crédit adapté pour lutter contre le surendettement
– Le CEC : le centre européen des consommateurs - Edith APPELMANS
– Test-Achats aide le consommateur à éviter le surendettement - Françoise DOMONT-NAERT
Le CRIOC et l’éducation des jeunes consommateurs - Antoinette BROUYAUX
– Le GAS : Groupe Action Surendettement et les jeunes - Service prévention GAS
– Les écoles de consommateurs - Michel LAMBERT
– Asbl Bâtissons notre avenir. Groupe Solidarité Budget : rompre l’isolement - Vinciane VAN OPSTAL
– Solidarité Emploi Logement : former des consommateurs critiques - Isabelle EVRARD
– Cité du Coq : améliorer le bien-être des habitants - Annabel DEJARDIN
– CPAS de Charleroi : un intérêt certain pour la dimension prévention - Yvan COGO, Stéphane CAPURSO & Didier NEIRYNCK
– Prévention du surendettement et consommation raisonnable : deux démarches incompatibles ? - Jean-Marie BEGUIN
- 4 numéros qui se suivent
- Prix préférentiel au numéro
- Frais d’envoi gratuits !
- n°120 | Faire place à l’usager
- n°119 | L’intégration, l’affaire de tous
- n°118 | L’indispensable collectif
- n°117 | Où va le métier d’éducateur ?
- n°116 | Devenir parent. Quand tout n’est pas rose
- n°115 | Jeunes "incasables" - Comment mieux travailler ensemble ?
- n°114 | Nouveaux visages de la précarité & inégalités grandissantes
- n°113 | Quel accès à l’emploi pour les publics plus fragiles ?
- n°112 | Quand il y a urgence
- n°111 | L’usager au centre des réseaux
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Radicalisation violente. Analyse et balises pour le travailleur social
retour au sommaire du n°86 "Radicalisme violent. Comprendre, prévenir au-delà de l’urgence" Auteur(s) : Younous LAMGHARI Chercheur-consultant en diversité culturelle et religieuse Résumé : Au moment où l’actualité met les projecteurs sur le terrorisme islamiste, cet article apporte (…)