n° 103 - 2020
Comment se dessinent les fins d’accompagnement
Si les fins d’accompagnement sont parfois synonymes de « succès » tant aux yeux des intervenants que du bénéficiaire, dans d’autres situations, elles peuvent susciter chez les premiers et/ou le second des sentiments d’échec, d’impuissance, d’inachevé, de culpabilité, de crainte, d’abandon... Quand, pour quelles raisons l’accompagnement, s’arrête-t-il ? Quelles difficultés, enjeux, défis soulève la clôture de l’intervention ? Comment la penser, l’anticiper, la préparer au mieux ?
Éditorial
Dans l’état social actif, les fins d’accompagnement sont presque systématiquement programmées, elles font partie d’un processus vu en étapes, construit par paliers, amenant la personne présentant des difficultés et des manques, à acquérir progressivement des compétences et des capacités qui, in fine et idéalement, devraient lui permettre de quitter son statut de bénéficiaire et retrouver une pleine autonomie !
Dans la réalité, les fins d’accompagnement s’inscrivent bel et bien dans une temporalité déterminée, certes éventuellement aménageable, mais elles ne vont pas nécessairement de soi, ni pour les personnes aidées, ni pour les professionnels. De même, elles n’aboutissent pas toujours aux objectifs définis. Certaines peuvent surprendre positivement et correspondre à un réel envol, une autonomie plus affirmée, mais d’autres peuvent se solder par des échecs, des abandons, des retours à la case départ, créant des questionnements et parfois des sentiments d’inachevé, de crainte, de culpabilité... surtout quand les personnes se volatilisent vers un ailleurs inconnu et une possible errance.
Cependant, ce qui caractérise particulièrement ces fins, est certainement qu’elles n’en sont pas ou rarement ! Ainsi, bien souvent, elles ouvrent plutôt sur de nouveaux commencements : une nouvelle prise en charge, une nouvelle structure, un nouvel encadrement, plus léger ou mieux adapté, et parfois, un nouveau départ dans un lieu de vie à soi, avec la mise en place de services en satellites.
On retrouve ici, sinon l’idée de paliers, celle de continuité où les fins méritent d’être préparées car elles font partie intégrante du processus ; voire même d’être pensées dès le départ, en même temps que les objectifs qui, eux-mêmes, évolueront tout au long. Cette préparation passe par des moments d’écoute, d’échanges et de parler vrai avec la personne mais aussi par une attention portée à la façon de faire lien avec elle puisqu’il faudra inévitablement le défaire... Elle nécessite aussi de la part des équipes des réunions, des supervisions, des rencontres avec l’entourage, les tiers, les éventuels mandants, et aussi des adaptations, de l’imagination, du réseautage pour créer des pistes et des alliances pour l’après. Enfin, quand le moment approche, la pratique du tuilage permettra, si l’on en prend soin, d’assurer au mieux la passation, le relais et de réduire le risque que la personne, traînant déjà parfois dans son parcours nombre de ruptures et d’abandons, ne se sente (une nouvelle fois) « lâchée ».
Ces fins, qui veillent à la continuité et peuvent paraître sans fin, travaillent sur le front de la prévention, tendant à éviter aux personnes les plus fragilisées, les rechutes, les enlisements et les tombées à pic dans des situations de plus en plus complexes et dégradées. Elles viennent questionner ainsi le sens et les finalités autonomistes du travail social contemporain, soumis à des logiques managériales et gestionnaires où la segmentation du temps sert l’évaluation. A moins que, prises sous un autre angle, elles n’interrogent nos capacités à oser la rupture ou tout au moins le lâcher-prise.
Sommaire
– Stop ou encore ? La fin de l’accompagnement en question(s) - Claudine HOURCADET
– Les fins d’hébergement en maison de soins psychiatriques - Géraldine FINEUSE (interview)
– Adolescence, mise en autonomie et fin d’intervention - Rabie BAJRAKTARI
HORS DOSSIER (rubrique COUP D’OEIL) :
– Les usager·es de drogues face à la crise sanitaire Quelles leçons tirer pour demain ? - Clémentine STÉVENOT Article en libre accès !!
– Le Krump danse urbaine et outil socio-éducatif potentiel - Jonathan COLLIN
- 4 numéros qui se suivent
- Prix préférentiel au numéro
- Frais d’envoi gratuits !
- n°120 | Faire place à l’usager
- n°119 | L’intégration, l’affaire de tous
- n°118 | L’indispensable collectif
- n°117 | Où va le métier d’éducateur ?
- n°116 | Devenir parent. Quand tout n’est pas rose
- n°115 | Jeunes "incasables" - Comment mieux travailler ensemble ?
- n°114 | Nouveaux visages de la précarité & inégalités grandissantes
- n°113 | Quel accès à l’emploi pour les publics plus fragiles ?
- n°112 | Quand il y a urgence
- n°111 | L’usager au centre des réseaux
EN LIEN AVEC CE NUMÉRO...
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« Parle à mon corps ; l’inceste l’a rendu sourd » : de la nécessaire évolution d’une pratique au service des mineurs victimes d’abus sexuels au sein de leur famille
retour au sommaire du n°80 "Le corps dans l’intervention (psycho)sociale" Auteur(s) : Samira Bourhaba Directrice du service Kaleidos, Liège Premières lignes : Engagés depuis une dizaine d’années dans l’aide aux mineurs victimes d’abus sexuels intra-familiaux et/ou mineurs auteurs de (…)