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n°60

Prendre soin de soi... un itinéraire vers le bien-être

Article issu du n°60 de la revue l’Observatoire : "Davantage de Bien-être pour les publics précarisés "


Auteur(s) :

BAILLY Karine

Assistante sociale. CPAS de La Louvière


Mots-clés :

Bien-être - soin de soi - image de soi - précarité - centre public d’aide sociale - insertion sociale - loyauté familiale - rompre le cercle de l’échec


Extrait :

(...)

Prendre soin de soi... Cela commence par « bien naître » puisque les premiers pas que nous faisons dans la vie, le soutien que l’on trouve ou non autour de soi, ébauche notre futur. A ce stade, la précarité seule n’explique pas les carences ou les succès. Seuls comptent la présence et l’amour dont les parents entourent leurs enfants. A partir de là, le petit d’homme va se construire et suivre son chemin avec le soutien de ses proches, celui des enseignants qu’il rencontrera et à travers ses choix plus tard. Tout ce bagage que nous transportons donne à chacun un sentiment d’efficacité personnelle pour aller vers les autres et affronter le regard d’autrui. Parfois l’itinéraire est simple et puis parfois, il est plus compliqué voire très compliqué.

Sortir du cercle infernal de l’échec peut ainsi être vécu comme un risque. Réussir un projet, qu’il prenne la forme d’une formation ou d’une mise à l’emploi, semble alors dangereux car inconnu. Pour ces personnes ayant connu l’échec à l’école ou en formation mais aussi peut-être celui de leurs frères et sœurs, s’en démarquer reste parfois difficile. Malgré la difficulté de s’y retrouver une nouvelle fois confronté, l’échec est parfois mieux vécu que la réussite potentielle.

Cela peut nous sembler difficilement compréhensible mais il est parfois plus facile pour certains de retourner vers ce qu’ils connaissent ou que leurs proches connaissent et admettent, au rique de s’éloigner de ces derniers. Cela est tout particulièrement le cas dans les familles les plus précarisées parfois aidées de génération en génération par les systèmes de sécurité sociale, quelle que soit la forme que ces derniers prennent.

Une nouvelle fois dans ce cas, le positionnement des parents face au projet entrepris revêtira une grande importance comme vecteur de réussite ou d’échec. Une jeune fille exprima ainsi avec beaucoup d’émotion, lors d’une évaluation du parcours de formation, qu’elle ne comprenait pas pourquoi nous étions fiers d’elle alors que sa propre famille se détournait d’elle lorsqu’elle évoquait les projets qu’elle avait pour l’avenir. Elle expliqua être très désoeuvrée par le fait que ses parents, frères et sœurs ne marquaient jamais d’intérêt au contenu que pouvaient avoir ses journées de formation ni au fait qu’elle puisse par la suite décrocher un emploi au terme de celle-ci. Ce manque d’intérêt pour la formation était vécu comme un manque d’intérêt pour sa personne elle-même et son devenir alors que de l’intérêt était porté par les parents à certains membres de la fratrie se plaçant en situation problématique telle qu’une grossesse non désirée ou des problèmes de vandalisme. Au cours de sa formation et lorsque le moral était au plus bas, cette jeune fille tenta de provoquer ou de demander à plusieurs reprises qu’il soit mis un terme à sa formation comme si elle ne pouvait, finalement, que correspondre aux attentes qu’elle avait décelées ou cru déceler chez ses parents.

Nous rencontrons trop régulièrement, à travers notre pratique professionnelle, des personnes abîmées par les aléas de la vie mais aussi par leur histoire personnelle qui a laissé des plaies béantes sur l’image qu’elles ont d’elles-mêmes. Travailler avec elles sur cette image qu’elles renvoient également aux autres participe d’un processus de guérison où, peu à peu, il faut prendre le temps de panser les blessures. Un réel accompagnement est alors parfois nécessaire avec des professionnels de la santé mentale car les failles sont telles qu’elles ne peuvent être comblées ou mises à jour sans précaution. En tant que travailleur social, il est indispensable de pouvoir cerner notre sphère de compétences et de ne pas se lancer dans des actions où nous serions finalement dans l’impossibilité de gérer les points qui seraient mis à jour. Des relais existent, je pense que nous devons avoir l’humilité de les utiliser et de travailler en réseau.

Outre ce suivi et cet accompagnement social voire psychologique, il est très important de se réapproprier une image physique positive. A côté de ce travail de fonds, des actions bien concrètes peuvent aider ces personnes à changer leur image.

Permettre à celles-ci de se vêtir décemment, d’avoir la possibilité d’entretenir leur linge mais aussi de côtoyer des services visant une amélioration de leur image est nécessaire. Cela peut passer par une coupe de cheveux, pouvoir se laver de manière correcte dans des locaux adaptés mais pourquoi pas également par la possibilité de bénéficier de soins visant le bien-être du corps. Les massages, les soins esthétiques, l’apprentissage du maquillage ou des soins corporels apportent une dimension nouvelle au fait d’être « bien ». Pour certains, il s’agira d’un réel apprentissage dans ce domaine mais qui apportera parfois de nouvelles forces pour aller vers autrui. Certains y prendront goût, d’autres pas. L’important, je pense, est que cette possibilité existe et que la précarité ne soit pas un obstacle infranchissable à pouvoir bénéficier de telles mesures. Un climat de non jugement et d’acceptation est indispensable dans ce cas de la part des professionnels amenés à prodiguer de tels soins car il s’agit pour beaucoup d’un acte de mise à nu où le malaise pourrait rapidement prendre le pas sur l’envie de découverte.

L’objectif à travers ces soins est bien entendu également que la personne trouve l’envie et le goût de continuer à prendre soin d’elle-même mais également de ses proches. Le soin porté aux enfants peut ainsi revêtir de nouvelles facettes où le toucher, les massages peuvent permettre de démontrer son amour autrement.

(...)

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